PATOUÈI DÈ LA VALÉ DOEU TRËYIN


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DESCRIPTION ET SOURCES

Initialement, le projet était entièrement consacré à la construction du dictionnaire patois de la vallée du Trient, à sa publication sur le web, à son enregistrement audio et à l'édition et publication d'un ouvrage (voir plus bas).

Peu à peu, d'autres missions de sauvetage sont apparues essentielles et se sont rajoutées:

- la mise en ligne et l'enregistrement des histoires patois conservées par la tradition

- la mise en ligne et l'enregistrement de l'ouvrage à grande valeur ethnologique: "Le patois des Marécottes" de Marianne Müller

- la mise en ligne et l'enregistrement des toponymes patois de la vallée du Trient

 

Les sources :

Diverses sources documentaires de grande valeur ont été exploitées pour permettre la réalisation de ces missions :

 

1. Les manuscrits patois de Denis Coquoz

Denis CoquozDenis Coquoz des Marécottes (1887-1962), éleveur de montagne, scientifique autodidacte, historien amateur, botaniste réputé et patoisant hors norme du siècle passé, a offert un trésor d’une richesse extraordinaire au patrimoine culturel de la vallée du Trient.

Le manuscrit, commencé en juin 1951 et terminé le 2 décembre 1957, intitulé “Le Glossaire du patois de Salvan”, décrit en réalité dans le détail le patois de toute la vallée, de Miéville à Trient, en passant par tous ses villages et hameaux. Basé sur des milliers de notes relevées minutieusement dans le terrain par l’auteur dès 1916, l’ouvrage recouvre une grande quantité de mots patois et d’expressions couvrant tous les aspects de la vie locale d’antan, des descriptions des us et coutumes, des dictons...

Il s’agit en fait d’un véritable trésor ethnologique qui retrace l’esprit et la pensée des populations d’éleveurs alpins d’autrefois.

 

Emergeant de la grande richesse documentaire du sous-fonds Denis Coquoz, plusieurs dizaines de carnets de notes numérotés de 1 à 38, dont certains disparus (FRL 2/3/2/1 à 38), soit plus de 850 pages contenant des milliers d’expressions et de mots patois relevés dans la vallée du Trient et dans les environs par Denis Coquoz dès 1916, ont permis à l’auteur de construire son glossaire.

Un carnet contient diverses correspondances de Denis avec les rédacteurs du Glossaire des patois de la Suisse romande, dans un contexte de recherche de phonétique appropriée et de règles de graphie (FRL 2/3/2/38).

Les documents sont conservés dans le fonds d'archives privé de Raymond Lonfat (FRL).

Sous FRL 2/3/1/1 à 11, sont cotés les cahiers du glossaire écrits par Denis. Ceux-ci regroupent environ 1200 pages d’un texte rédigé avec une belle écriture régulière.

Un certain nombre de dessins explicatifs figurent également dans ces cahiers.

La cote FRL 2/3/3 désigne une cartothèque de mots et d’expressions patois.

Sous les cotes FRL 2/3/4 à 8, sont répertoriées diverses histoires et légendes en patois, chants, jeux populaires disparus, notes sur
des sujets de la vie quotidienne et des métiers d’antan, quelques dessins, notes sur la prononciation…

 

2. Les histoires rapportées par la tradition

Les Histoires ont été écrites par Madèléna dans la graphie élaborée pour le dictionnaire.
Leurs origines sont principalement :

- Les histoires recueillies dans les souvenirs de Madèléna(Madeleine Bochatey), et publiées dans " La Dzappe " (revue d'informations locales aujourd'hui disparue).
- Les histoires retrouvées dans les archives de Denis Coquoz.
- Le livre de Marianne Müller, apportant beaucoup d'indication concernant les us et coutumes établis dans la vallée du Trient.
- Le livre " Guide et légendes de Salvan " de Louis Coquoz, consulté maintes fois.

 

 

 3. Le patois des Marécottes de Marianne Müller

Marianne MüllerLe " Patois des Marécottes, commune de Salvan, Valais ", paru aux éditions Max Niemeyer Verlag / Tübingen 1961 est sans conteste un excellent ouvrage. Dans les années 1950, son auteur, Marianne Müller, spécialiste en dialectologie, a séjourné longuement et à maintes reprises dans le village des Marécottes. Là, ainsi que dans les autres villages de la commune de Salvan dans une moindre mesure, elle a eu de nombreux et très cordiaux contacts avec la population locale. Consciencieusement et patiemment elle a interrogé ceux que les dialectologues appellent des " témoins ", c.-à-d. des personnes qui dans ces années-là parlaient encore couramment le dialecte franco-provençal de la Vallée du Trient. Marianne Müller s'est littéralement imprégnée du patois de ce petit coin des Alpes valaisannes si cher aux écrivains Emile Javelle et Edouard Rod.

Pour mener à bien son projet, elle a appliqué les préceptes du dialectologue français Alain Lerond, professeur à l'Université de Paris-Nanterre : celui-ci affirme que " pour donner des résultats satisfaisants, une enquête dialectologique doit s'exercer sur un territoire relativement restreint et être accompli par un linguiste averti. " 1)

Marianne Müller, bénéficiaire d'une solide formation linguistique, connaissait parfaitement l'ensemble des règles lexicales et syntaxiques nécessaires à la production des phrases patoises. Grâce à une transcription phonétique très précise elle a pu, avec beaucoup d'acuité, transmettre à la postérité le langage des gens de la région. Fervente disciple de son directeur d'études, le célèbre linguiste et lexicographe suisse Walther von Wartburg (celui-là même qui rédigea pour sa grande part le Französisches Etymologisches Wörterbuch), elle a écouté attentivement les propos spontanés des gens qu'elle côtoyait et les a souvent très habilement incités à parler au moyen de la conversation dirigée. Plutôt que de poser des questions directes, concernant la traduction de tel ou tel mot par exemple, elle a incité les autochtones à s'exprimer sur les domaines caractéristiques de la communauté montagnarde qu'elle étudiait. Très savamment elle a regroupé par thèmes les différents domaines abordés. Dans la préface de son livre, elle précise qu'elle a privilégié la phrase et le texte (récits, dictons, proverbes, expressions, etc.) qui rendent compte d'une langue d'une manière bien plus vivante que ne le ferait une simple énumération de termes.

 

Le livre de Marianne MüllerGrâce à cette approche, le lecteur découvrira un ouvrage dont la portée dépasse celle d'un simple glossaire. De fait, outre le patois des Marécottes dont elle avait une connaissance très intime, c'est aussi une mine de renseignements fort intéressants sur les mœurs, la faune et la flore de la vallée du Trient que Marianne Müller nous invite à découvrir !

 

1) L'enquête dialectologique en territoire gallo-romain; revue " Langages " 1968 : no 11 ; vol.3 ; pg 84-100.

 

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Trois sources importantes, complémentaires, uniques, permettent d’effectuer un travail en profondeur dans la conservation des toponymes de la vallée du Trient : les fiches d’Ernest Muret, les cahiers et croquis de Denis Coquoz, et les inventaires toponymiques de Michel Coquoz :

 

4. Les manuscrits toponymiques de Denis Coquoz

Dans le fonds d’archives de Raymond Lonfat (FRL) disponible sous www.digi-archives.org, sous la cote FRL 2/2, « Description toponymique et dessins des lieux de la vallée du Trient », se trouvent sous FRL 2/2/1 trente et un cahiers de descriptions toponymiques.

C’est par au travers de centaines de pages du type de celle proposée ci-dessous que Denis Coquoz décrit les toponymes de la vallée du Trient.

Croquis de Denis Coquoz

 

 

A titre d’exemple pour les dessins si précis de Denis Coquoz, un croquis emprunté de la page 38 du livre l’ERBA de Raymond Lonfat, ainsi qu’une autre représentation de la pages 395 du même ouvrage :

croquis
Les lieux-dits du mont de l'Arpille n'avaient pas de secret pour Denis Coquoz. Grâce à son extraordinaire talent, la richesse toponymique de la vallée est préservée. Ici, 1 La Téta doeu Lètchoeu, 2 Lo Gran Echè, 3 li Krote di Tsaravé, 4 Li Krote doeu Goné, 5 La Lantse dè la Chofa, 6 Lo Kro doeu Tsené.

 

croquis
Dessin de Denis Coquoz de mars 1924 représentant le Sex des Granges. Les numéros désignent les lieux-dits suivants : 1 lo Bètzà di Dalyète, 2 li Din a l'Atro, 3 Pro Byolin, 4 la Gordze ke derotsè, 5 l'Avotye, 6 lo Vané a Peri Blan, 7 li Vané a la Tirola.

 

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5. Les fiches toponymiques de Ernest Muret

couverture du livreErnest Muret (1861-1940) fait ses études universitaires à Lausanne, Berlin et Paris. Chargé de cours à l'université de Lausanne (1893-1919) et professeur de philologie romane et de littérature méridionale à l'université de Genève (1891-1935). Collaborateur du Glossaire des patois de la Suisse romande (1924-1933), Muret. est connu pour ses travaux d'onomastique romane, notamment pour son enquête sur 950 toponymes de la Suisse romande, conduite entre 1901 et 1931 (125 000 fiches manuscrites). Chevalier de la Légion d'honneur et de l'ordre de Léopold, docteur honoris causa des universités de Lausanne et de Zurich.

 

Voir également la page "le Fichier Muret" sur le site du Glossaire des patois de la Suisse romande

 

Ernest Muret a offert à la vallée du Trient un cadeau inestimable. A l’âge de 18 ans déjà, vers 1880, puis plus tardivement, il parcourt ses hameaux, de Vernayaz à Trient, repère et décrit des centaines de toponymes et microtoponymes et transcrit avec sa propre méthode phonétique leur prononciation patois.


Pour Finhaut, 184 fiches.

Pour Salvan, plus de 500 fiches.

Pour Trient, 222 fiches.

Pour Vernayaz, 98 fiches.

Une fiche muret

L’enregistrement de ce témoignage extraordinaire, ces noms dont beaucoup disparus ou en voie de disparition, imaginés et créés par les éleveurs de la vallée au cours des siècles, fait définitivement partie de la mission de sauvetage du patois élaborée par les responsables du projet. Comment ne pas sauver le son des noms de lieux qui ont vu naître et vivre toute cette région ?


La tâche est néanmoins compliquée car il s’agit tout d’abord de transcrire plus de mille fiches manuscrites aux annotations parfois complexes, puis de réécrire les noms en patois selon les règles de graphie observées par le groupe de travail. C’est seulement alors que l’enregistrement pourra s’effectuer. Le travail de séquençage de l’enregistrement permettra ensuite à l’ensemble texte-audio d’être mis sur le web, selon la même technique déjà employée pour le dictionnaire en ligne.

 

Vers les années 2000, Raymond Lonfat, à l’aide de plusieurs amis des divers villages et hameaux de la vallée du Trient, dès Vernayaz et Miéville, reporte ces microtoponymes sur les plan cadastraux concernés. A terme, des reproductions de ces plans seront disponibles dans ce site web.

 

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6. Les inventaires toponymiques de Michel Coquoz

Michel Coquoz Michel Coquoz, né à Salvan le 21 août 1928 à Salvan, décédé en janvier 2010, est le petit neveu de Louis Coquoz des Marécottes. Après des études au collège Saint-Michel à Fribourg, il occupe diverses fonctions, dont celle de teneur des registres cadastraux de la commune de Salvan et d'arpenteur. Amoureux de la nature, apiculteur passionné, viticulteur, il s'intéresse à la recherche toponymique et constitue divers inventaires toponymiques de la région de Salvan.

 

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La construction du dictionnaire : méthode de travail

Diverses institutions et personnalités du monde du patois ont élaboré les principes d’une graphie commune pour tous les patois valaisans. Ces règles, décrites dans le portail "patois du Valais" de la Médiathèque valaisanne, sont suivies par le groupe de travail. La discipline de la façon de rédiger et les décisions d’écriture finales ont été adoptées après consultation avec des experts en novembre 2012.

Une secrétaire a retranscrit sur ordinateur les manuscrits numérisés de Denis Coquoz. Les pages dactylographiées ont été transmises aux trois collaborateurs en charge de construire le dictionnaire.

Chaque collaborateur retravaille personnellement les pages reçues en y apportant les corrections, les modifications et les compléments nécessaires ; il le fait selon des critères préalablement établis, notamment en ce qui concerne la traduction française des mots et des exemples, les abréviations utilisées ainsi que la graphie du patois selon des symboles phonétiques clairs pour permettre une prononciation correcte de la langue. Une fois ce travail accompli, les pages corrigées sont retranscrites une deuxième fois. A intervalles réguliers (environ une fois par semaine), les trois collaborateurs se réunissent et retravaillent ensemble les pages nouvellement retranscrites en les relisant attentivement. D’un commun accord ils apportent les modifications qu’ils jugent nécessaires. A ce stade-là du travail, les pages sont prêtes pour le dernier regard qu’il conviendra d’effectuer avant l’édition du dictionnaire et dans un premier temps, de la mise sur le web.

 

Le futur ouvrage

Le Dictionnaire du patois de la vallée du Trient fera référence parmi les ouvrages déjà édités dans le canton. A titre indicatif, il sera de taille très comparable à ceux du patois de Nendaz et de Lens, avec une nuance importante: la prise d’information ne date pas de notre monde contemporain mais des années 1900 à 1950. Le dictionnaire offrira dès lors sans doute nombre d’expressions disparues dans le courant de la fin du siècle dernier.

Avec un avant-propos écrit par Gisèle Pannatier, l’ouvrage de plus de 700 pages sera composé d’une brève description des règles de phonétiques utilisées, du dictionnaire comprenant une foule d’exemples et de phrases utilisant le mot en référence, de quelques éléments de grammaire et de conjugaison, d’un index français.

 

Le graphisme et l’édition

Cet ouvrage à tirage restreint, tout comme de récentes publications dans la vallée du Trient, sera d’un graphisme attrayant, rendant la lecture agréable.

Il contiendra plus de cinquante dessins descriptifs de mots patois retrouvés dans les notes ou dans le Glossaire de Denis Coquoz.

A ce stade de préparation, il est envisagé d’éditer ce livre à compte d’auteur, soit au nom de l’association Li Charvagnou. L’ouvrage sera numéroté.


L’enregistrement audio

A l’instar de quelques autres régions ayant déjà édité des dictionnaires du patois, Li Charvagnou assume sa mission de sauvetage de cette langue par l’enregistrement intégral du patois écrit dans l’ouvrage, mots et phrases d’exemples. Une attention particulière et un grand professionnalisme sont apportés à cet enregistrement audio effectué en studio dans des conditions d’enregistrement idéales. Durant des phases de travail de moins de deux heures (environ 500 mots), divers lecteurs patoisants (locuteurs) lisent les textes du dictionnaire, en bande continue, brute. Une écoute de contrôle des enregistrements permet de reprendre les séquences non satisfaisantes, puis les enregistrements sont séquencés et codifiés par le webmaster. Les fichiers sonores ainsi créés peuvent alors être reliés aux portions de texte concernées.

L’étape du travail à effectuer sur les fichiers audio est importante, d’une part parce qu’elle se doit d’être très précise et soignée, et d’autre part parce qu’elle comprend le séquençage, la codification, le référencement des milliers de fichiers reliés aux milliers de mots et de textes du dictionnaire.

 

La base de données web

Au fur et à mesure de l’avancement du travail, les documents Word préparés par les patoisants sont transformés par le responsable du projet web en deux versions différentes, une devant servir pour l’impression de l’ouvrage décrit précédemment, l’autre pour l’importation des données en base de données, et finalement la constitution elle-même de la future base de données, qui incorpore également les milliers de fichiers audio séquencés.

 

Le site internet

La publication du dictionnaire sur le web se fait sur le web. Le site www.patoisvalleedutrient.ch  s’inspire de certaines propositions déjà existantes, mais comporte diverses particularités intelligemment mises en forme par le concepteur et webmaster professionnel responsable du projet.

La mise en ligne du dictionnaire est accompagnée de l’enregistrement décrit ci-dessus et, dans la mesure du possible, de l’enregistrement et de la publication video de films mémoires, basés par exemple sur la lecture de sources écrites, contes, légendes de la vallée du Trient ou tout autre matériau informatif ou didactique. Une fonction de recherche de mots à partir du français ou du patois est déjà fonctionnelle.


Le système utilisé permet soit une lecture accompagnée par le son, soit la lecture d’un mot trouvé par le moteur de recherche et accompagné par le son, soit si possible les deux. Des liens avec les associations patoisantes, la Fédération cantonale valaisanne des amis du Patois, la Fondation du Patois, le Glossaire des patois de Suisse romande, le Centre de dialectologie et d’étude du français régional, L’ami du patois, les communes concernées, les universités populaires, les centres de documentation, les médiathèques et autres, permettent aux utilisateurs de s’inviter sur le site.

Le site web est alimenté au fur et à mesure de l’avancement des travaux.

 

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